mercredi 19 octobre 2011

Débuter en tant que Maitre du Jeu : L'Improvisation

Débuter en tant que MJ : L’impro


L’improvisation en JDR est aussi indispensable que périlleuse. Car c’est bien connu : les joueurs iront toujours chercher la seule voie à laquelle vous n’avez pas pensé ! Sujet de recherche de nombreux gardiens débutants désireux de trouver la « potion magique », voici des conseils pour réussir à se débrouiller quand le scénario sort un peu des clous.



Lien vers la première partie :
- Débuter en JDR : Le Rôle du Maitre du Jeu

Rester souple…

L’improvisation se révèlera nécessaire à chaque fois que les PJ iront dans une direction qui n’était pas prévue à l’origine par le MJ. Autant dire que cela arrive très très souvent étant donné qu’il est irréaliste d’écrire toutes les situations possibles et imaginables sur papier.
Elle permet surtout d’être souple vis-à-vis des actes et paroles des PJs. En effet, il n’y a rien de plus gratifiant quand on est joueur, que de se rendre compte que ce que l’on fait ou dit dans le jeu a une véritable influence sur la partie et le déroulement du scénario.  Au contraire, en tant que joueur, je n’ai jamais autant rencontré de frustration que lorsque j’avais l’impression que mes décisions n’avaient aucun impact et que le scénario se déroulerait implacablement de la même façon quoi qu’on y fasse. Genre : « Oui oui, mais c’est pas prévu dans mon scénar alors ça ne se passera pas comme ça ». Un peu comme le héros du Truman Show qui se retrouve prisonnier de sa ville fictive et qui tombe sur l’envers du décor dès qu’il va là où il n’est pas censé aller…
Cette influence sur le scénario peut être mineure, et ne pas affecter le fond de l’intrigue. Il ne peut s’agir que de détails, mais qui participeront grandement à l’implication des joueurs dans la partie. Par exemple, avoir aidé la fille de l’aubergiste alors qu’elle était chahutée par un groupe de gros lourds pourra leur valoir une chambre gratuite et une meilleure réputation auprès des habitants.
Au contraire, les actions de méchanceté gratuite ou intéressée des PJs devraient se ressentir également. Je me souviens d’une partie de D&D où certains joueurs avaient été un peu vexés de s’être faits rembarrés par le tavernier, et avaient voulu lui faire « payer » en faisait cramer son établissement dans la nuit. Action, qui en passant, correspondait assez au caractère impulsif et un peu con des personnages concernés. Au final, le feu s’était propagé accidentellement aux bâtisses alentours et la moitié de la ville s’est retrouvée en cendres, devant des PJs médusés, un peu dépassés par les évènements… Oups ! ^^ C’est une manière comme une autre de « responsabiliser » les joueurs sur les actions de leurs PJs.
Cette impression qu’auront les joueurs d’avoir un réel impact sur la partie leur fera gagner beaucoup de confiance envers vous, c’est certain.


… Mais garder le contrôle


On ne vous demande pas non plus que la moindre action insignifiante des PJs ait une portée monstrueuse dans la résolution du scénario. Vous vous rendez bien compte que ça devient compliqué si chaque parole des PJ doit modifier en profondeur l’histoire.
Il est conseillé de bien garder en tête les grandes lignes de l’intrigue quand on se lance dans une impro. Le risque principal étant que la scène improvisée que vous ayez fait jouer fasse partir le scénario dans tous les sens, et en particulier à l’opposé de ce que vous vouliez…
Exemple : un PNJ totalement mineur sans lien avec le scénario (le pompiste de la station service) que les PJ interrogent pour une affaire de meurtre, à qui vous voulez donner un peu de profondeur et qui lâche une anecdote malheureuse à propos d’un client latino parti sans payer à bord d’une Ford Focus grise (alors que le tueur est blanc et circule à moto). Et les voilà partis pendant 6h de jeu à la recherche d’un portoricain en Ford grise sans aucun rapport avec l’enquête… Notez que les fausses pistes peuvent avoir leur utilité dans une enquête, mais l’important étant de garder le contrôle sur la tournure générale que prend le scénario.

L’improvisation peut aussi permettre de remettre sur les rails des PJs égarés depuis un peu trop longtemps sur une fausse piste : un autre témoin qui a vu un gars s’enfuir à moto, un tuyau du central de la police qui les informe sur un feu rouge grillé par un motard qui a tiré sur les flics venus l’arrêter avant de s’enfuir… Pourquoi ne pas carrément improviser une course poursuite entre le suspect et les PJs ? Tant que les grandes lignes du scénario sont respectées et que l’intrigue ne parte pas encore plus en couille! C’est une manière de recoller les différentes scènes d’intérêt de votre histoire.

Pour reprendre l’exemple précédent du feu de taverne qui s’est répandu dans toute la ville, je m’étais permis cette petite folie parce que je savais que les PJs n’avaient plus rien à faire dans cette ville. A côté de cela, les PJs (y compris les coupables) ont été les premiers à tenter d’éteindre le feu et de secourir les gens piégés et ont été considérés par la populace comme de véritables héros (situation qui a fait un peu rire jaune les PJs qui n’étaient pas directement impliqués dans l’incendie…). Les PJs se sont paradoxalement recadrés tous seuls, ils ont bien vu que leurs actions avaient des conséquences directes parfois dramatiques, et le fond du scénario est resté inchangé. N’allez pas provoquer la 3ème guerre mondiale en plein New-York juste pour relancer un peu votre scénario d’enquête policière !

En deux mots, les choses importantes à retenir pour le bon déroulement du scénario, c’est de réfléchir aux conséquences de votre impro (tout comme à celles des actions des PJs), à la fois sur l’univers de jeu, et surtout, sur le déroulement du scénario. Gardez en tête le fil rouge de votre histoire.


La préparation


« L’impro ne s’improvise pas », comme on pourrait le dire. La meilleure façon de savoir où l’on va quand on improvise, c’est d’avoir préparé le terrain, le contexte. Plus vous avez réfléchi à la manière dont s’articule l’univers de jeu, quels sont les rapports entre les différents protagonistes, quelle est la personnalité des PNJs ; plus l’impro vous viendra naturellement et plus vous en maitriserez les conséquences. C’est ici que le travail de préparation de la campagne prendra toute son importance, ce fameux et ingrat travail de préparation, celui dont les joueurs n’imaginent même pas l’ampleur.
Savoir un minimum quelle est l’ambiance générale des différents quartiers de New-York dans lesquels les PJs iront enquêter permet de ne pas se retrouver au dépourvu quand ils se lanceront dans une course poursuite à pied au milieu des ruelles.

Pas besoin de prévoir à l’avance 50 pages de plans complets de différents lieux où les PJ sont susceptibles  de se rendre ; on tomberait dans l’extrémisme ! Dans tous les cas, ne paniquez pas et utilisez votre bon sens pour rendre les réactions des PNJ et les lieux crédibles. Une station service aura sûrement un rayon « boissons fraiches » avec quelques frigos remplis de sodas et des étalages remplis de « chiens qui remuent la tête » ou de sapins anti-odeurs à accrocher sur le rétroviseur…  Un automobiliste qui vient de percuter un suspect en fuite va probablement descendre de voiture, l’air totalement paniqué, en répétant toutes les deux secondes « C’était un accident !! » ou encore «Je ne l’ai pas vu venir ! Il s’est jeté sous mes roues !! ». Sa bagnole aura le radiateur défoncé et on peut imaginer un gros impact sur le pare-brise (plus gros qu’une pièce de deux euros…), etc…


L’impro « freestyle »

A contrario, l’improvisation « non contrôlée », absolument non préparée, peut être très intéressante, presque comme exercice de style. Comme premier scénario d’une campagne voire comme « one-shot », on peut imaginer un début de scénar totalement incompréhensible et tâcher ensuite d’improviser toute la suite, de lancer des pistes et d’étoffer celles que les joueurs auront suivies. Assez vite, vous arriverez à dégager une trame principale et ensuite d’enchainer les scènes jusqu’à la conclusion. Ca donne souvent des parties inattendues, très agréables et amusantes mais qui peuvent aussi parfois tourner un peu en rond quand on arrive plus tellement à trouver d’idées. C’est une bonne manière d’acquérir un peu d’expérience !

Il m’arrive aussi d’avoir prévu un scénar vraiment trop léger ou trop court, au milieu d’une campagne ; si je le sens sur le moment, il m’arrive d’improviser totalement la suite, avec plus ou moins de réussite. Si je ne le sens pas du tout et que malgré tout la partie s’est bien déroulée jusqu’ici, ou que par exemple le scénario s’est déroulé plus vite que prévu, je préfère souvent arrêter là, sur un bon sentiment, plutôt que de me risquer dans une impro incertaine. Comme vous le sentez !


Le feeling


Une grande partie du plaisir du MJ vient de ces séquences totalement improvisées dont vous ne pensiez pas vous sortir et qui finalement se révèlent être de véritables points culminants du scénario. N’oubliez pas qu’il s’agit avant tout d’une histoire de « feeling » et de plaisir, et il est parfois tellement plus marrant de partir dans une impro dont on ne connait pas l’issue, quitte à devoir rattraper le coup dans le prochain scénario de campagne !

Si vous le sentez, lancez vous, osez, et faites vous plaisir!


Autres articles de conseils aux MJ :
-    Conseils aux MJ débutants 1ère partie : Débuter en tant que MJ : le Rôle du MJ
-    Définition du jeu de rôles et déroulement d’une partie
-    L’introduction
-    Le contexte
-    La description des combats

Le blog de Steve (AJDR) avec une page consacrée aux introductions, avec entre autres l’idée du scénario totalement basé sur l’impro « freestyle ».


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2 commentaires:

  1. Article très intéressant.

    Le découpage que je fais généralement est cependant légèrement différent. Ce que tu décris comme de l'impro "préparée", j'ai tendance à le considérer non pas comme de l'impro mais comme une structure spécifique de scénario consistant à construire l'environnement de jeu (contexte) et à le rendre dynamique. C'est selon moi différent de l'impro car le MJ n'invente pas réellement l'histoire en temps réel, il la "déduit" de l'environnement qu'il a préalablement créé. Du coup, c'est ton "freestyle" qui correspond pour moi à l'impro.

    Bon, je chipote mais ça n'est qu'une question de vocabulaire en fait.

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  2. Merci de ton commentaire.

    Oui, je vois ce que tu veux dire, et à la première relecture de mon article avant publication, je me suis dit la même chose.
    C'est beaucoup une question de vocabulaire comme tu le dis, pour ma part je considère qu'il existe plusieurs niveaux d'impro :
    - au niveau du détail, qui consiste à rendre l'environnement de jeu dynamique, sans incidence directe sur la trame du scénario
    - au niveau de la trame même du scénario, qui correspondrait au "Freestyle"
    - entre les deux, une infinie nuance de gris (pratique ^^)

    Effectivement la plus grande partie de ce post concerne plutôt les "premiers niveaux" d'impro un peu plus relatifs à l'environnement qu'à la trame de l'histoire.

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